Quand on me demande quelle est l'exposition de mode que j'ai préférée jusque maintenant, je réponds invariablement qu'il s'agit de la présentation des créations de Madame Grès au Musée Bourdelle. Cette exposition m'avait ébloui par sa scénographie sobre mais parfaite et surtout, le dialogue entre les sculptures monumentales d'Antoine Bourdelle et les tenues ciselées de la créatrice semblait couler de source. Alors, c'est avec un certain plaisir anticipé que je me suis rendue de nouveau au sein de cet agréable musée/atelier afin d'y découvrir la nouvelle conversation que les conservateurs avaient décidé de proposer, cette fois avec les créations du couturier espagnol Cristobal Balenciaga. Et afin de rendre l'expérience encore plus brute et singulière, n'y sont montrés que des vêtements noirs, d'un noir dense et vibrant, si espagnol.
Entre les lignes épurées et architecturales du couturier et les silhouettes majestueuses du sculpteur, l'échange est évident. Et la scénographie intensifie le rapport alors que les conservateurs ont privilégié des bustes Stockman des plus simples aux piètements métalliques graphiques, des écrins de bois peints en noir comme des caisses d'atelier ou de rares protections de verre telles des socles.
Malgré l'élégance et le luxe des créations de Balenciaga, quelque chose d'indéniablement sobre voire austère s'en dégage tout comme les oeuvres de Bourdelle allient somptuosité et rusticité.
Ici point d'exposition blockbuster, tape à l'oeil mais plutôt l'envie d'un concept, une gloire au vêtement et à la technicité plutôt qu'au glamour gratuit. De toute manière, ça ne va pas avec la personnalité de Cristobal Balenciaga qui, même s'il a habillé les plus grandes mondaines de la société, est resté un homme discret.
Les salles du musée et notamment l'extension imaginée par Christian de Portzamparc, elles aussi, se marient bien aux créations rigoureuses du couturier. Que ce soit dans le bric à brac de l'ancien atelier ou face aux murs gris de ciment, elles trouvent leur place, tantôt pour mieux s'y opposer comme ces tailleurs raffinés jouxtant les outils du sculpteur, tantôt pour s'y mêler avec justesse, quand la modernité du ciment fait écho aux volumes inattendus des robes ballonnées.
Parce que malgré son austérité, Cristobal Balenciaga est un moderne, de ceux qui osent nier et déconstruire le corps de la femme pour lui apposer des formes amples, une expérimentation de la silhouette qui rappelle immanquablement les créateurs japonais comme Rei Kawabuko chez Comme des Garçons ou Yohji Yamamoto, un autre grand adepte du noir.
Et finalement, quand la couleur fait son entrée, c'est avec les derniers habits. Une touche de rose layette qui fait son apparition sous la forme de perles de tissu ou de rubans délicats qui se marient merveilleusement au noir profond, et la femme devient joli bonbon...
Balenciaga, L'oeuvre au Noir au Musée Bourdelle jusque demain!!
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