Ce dimanche s'achève l'exposition "Voyage en Capitale: Louis Vuitton et Paris", présentée au Musée Carnavalet.
J'avais très envie de voir cette exposition qui correspond à mes penchants "scolaires" et professionnels: c'est à dire les liens entre art, mode, luxe, design...Ici, nous pourrions particulièrement parler de liens entre patrimoine culturel et artisanat, arts décoratifs de luxe.
Le Musée Carnavalet qui accueille cette exposition est un lieu que j'affectionne tout particulièrement et qui est malheureusement souvent délaissé. Ce musée consacré à l'histoire de Paris est en tout cas un choix judicieux pour une telle exposition et lui permet d'être sur le devant de la scène.
Lorsque Louis Vuitton (1821-1892) ouvre son premier magasin, en 1854, il connaît rapidement le succès grâce à ses malles élégantes, pratiques et solides. Son fils, Georges (1857-1937) poursuit l'oeuvre de son père tout en développant une ingéniosité visionnaire et créative. La marque accompagne alors parfaitement une époque en pleine mutation et la révolution des moyens de transport. Enfin, Georges Vuitton est le créateur du fameux Monogram, emblématique de la marque et reconnaissable dans le monde entier!
Gaston-Louis Vuitton (1883-1970) est un esthète et "connoisseur" qui s'inspire des grands mouvements artistiques qui lui sont contemporains pour les créations de la maison: comme le mouvement De Stijl et l'Art Déco mais aussi l'art africain qui fascine les explorateurs.
Il est aussi le premier à donner beaucoup d'importance aux vitrines des magasins qui se doivent d'être minutieusement mises en scène. Enfin, c'est à lui que nous devons l'intégration de la mode aux créations de la marque.
Parallèlement, notons aussi, les jumeaux Pierre (1889-1917) et Jean (1889-1909) qui créent avec fougue des objets mécaniques novateurs tels un camping-car, un hélicoptère...pendant leur courte et flamboyante jeunesse.
L'exposition insiste plus particulièrement sur l'histoire de ces objets de voyage des origines de la marque aux années 1930. Les objets postérieurs se font plus rares et témoignent principalement d'une collaboration artistique, originale ou d'une création particulière à l'attention d'une célébrité.
La scénographie est extraordinaire et nous fascine dès la première salle consacrée aux débuts parisiens de la marque: plan de Paris avec les adresses de la marque au mur, posters des portraits des trois piliers de la marque...La salle est lumineuse et élégante.
Il y a une très bonne contextualisation grâce aux objets et oeuvres d'art historiques du musée ou prêtées par des Institutions extérieures.
Les objets sont présentées au sein de grandes vitrines claires.
C'est à ce moment là que je me suis fait choppée! Plus de photos... |
On pénètre dans la deuxième salle par une découpe en forme de Monogram (wouaw!). Cette dernière est donc, consacrée à la compréhension des inspirations esthétiques et artistiques de la maison à la fin du XIXème et début XXème mais aussi à l'origine de la création du fameux Monogram. On perçoit à quel point les mouvements artistiques étaient prégnants: les styles néogothiques (cher à Viollet le Duc) et troubadour mais aussi le japonisme. Des images animées sont projetées au plafond et encore des oeuvres de contextualisation: tableaux, dessins, vidéo...
Les troisième et quatrième salles présentent le rapport étroit de la marque avec les grandes expositions: Exposition Universelle, Salon de l'Automobile, Exposition Coloniale Internationale...La maison y est à chaque fois présente car elle est clairement associée au monde de l'automobile, des transports et évidemment du voyage et de l'exotisme. Ces salles regorgent de malles à pique-nique, à thé, de bricolage, lits de camp...et on découvre les "Missions Citroen" pour lesquelles André Citroen avait traversé le Sahara dans le cadre d'une "Croisière Jaune" (1922-23) et d'une "Croisière Noire" (1924-25) tout de Vuitton équipé!
Ces salles témoignent également de l'influence du mouvement Art Déco pour les créations de la marque mais aussi pour l'architecture de ses pavillons aux lignes modernistes et apurées.
Après ces cinq premières salles blanches et lumineuses, nous pénétrons un univers plus sombre (tonalités grises) avec la salle 6 consacré aux "Dandys" adeptes de la marque. Au début du XXème siècle, Louis Vuitton rend hommage aux hommes de l'époque comme l'indique la malle Stravinsky, par exemple.
La septième salle, en contrepoint, illustre les "Élégantes" clientes de la marque, dans une pièce rouge fort chaleureuse. On y découvre des créations féminines et amusantes (gros coup de coeur pour le nécessaire à chaussures avec étiquettes descriptives: le rêve...!).
La huitième salle présente les objets crées pour des célebrités du début du siècle: la malle de Paul Poiret, le Wardrobe de Guitry ou encore le Nécessaire à chaussures d'Yvonne Printemps...
Sylvie Fleury |
Le dernier long couloir est une sorte de récapitulatif et de confrontations de commandes spéciales anciennes et contemporaines (on revient au blanc dans un esprit très moderniste avec un étagement de boites contenant les objets). On y retrouve le "Vuitton bag" de Sylvie Fleury (2006), la boite à pharmacie Croix Rouge (1914), la malle à chaussures Manolo Blahnik (1996), une malle à Barbies multicolore de 2003, une malle à dents de lait de 2007 (trop choupinet!), la malle à I-Pod de Karl Lagerfeld...
C'est très intéressant mais pitié la musique de la vidéo "Savoir-Faire" est insupportable!
Un renfoncement présente deux commandes spéciales, dans une pièce capitonnée de noir, créées pour l'artiste Damien Hirst, en 2009. Une malle à Pharmacie et une malle de Chirurgie remplies d'objets de torture et ornées de papillons et dans des tons bleu et noir chers à l'artiste!
Enfin, la dernière salle est une installation de Frédérique Chauveaux, "Bon Voyage", commandée spécialement par la maison pour l'exposition. L'artiste s'intéresse au rapport qu'entretient le corps avec l'espace grâce à des objets (malles, lit...) et des vidéos représentant le balancement de la mer, des mains, un corps se mouvant. C'est troublant voire enivrant mais très intéressant!
Bon, pour faire bref, j'ai vraiment beaucoup aimé cette exposition tant par la thématique que par sa scénographie géniale (j'aurais adoré travailler dessus: Patrimoine Vuitton, si vous m'entendez!) ! Le sujet permet de non seulement mieux connaître la maison de luxe mais aussi comprendre une époque, une fin de siècle et début d'un autre pendant lesquels les choses sont allées si vite avec des innovations par centaines...On découvre Paris et ses esthètes voyageurs et les liens étroits entre art et artisanat/ commerce se confirment.
Alors oui, on peut polémiquer: cette exposition n'est-elle pas simplement un gros coup de pub pour la marque? Nombre de personnes s'interrogent...Je pense que la France a un train de retard et que dès qu'il s'agit d'une exposition liée à une marque de mode ou de luxe, des voix s'élèvent un peu injustement. Louis Vuitton, dans ce cas, est avant tout présentée comme une marque "artisanale" à l'histoire riche; il n'y a pas de photos de mode, de ventes de sacs à mains à la boutique de souvenirs...Et puis, si cela peut apporter des visiteurs un peu différents au musée: pourquoi pas? Les musées manquent cruellement de moyens et se doivent d'adopter des techniques commerciales et de marketing fortes s'ils souhaitent tenir la route: la concurrence est rude comme dans n'importe quel domaine commercial!
Une autre polémique entourait la question de l'activité plus ou moins collaborationniste de la marque durant la Seconde Guerre Mondiale qui n'est pas étayée dans l'exposition, oui tout comme les années 50,60,70,80...!
Je ne veux pas défendre la marque qui a effectivement eu une activité trouble pendant cette guerre (mais dans ce cas boycottons Chanel aussi...) mais je ne pense pas que ce soit là le sujet: comme je l'ai dit l'exposition met en avant une époque allant jusqu'aux années 30 et plusieurs décennies postérieures sont mises de côté mais ne serait-ce pas simplement une logique historique? A partir de cette époque, le monde évolue et les gens ne voyagent plus avec des malles! Ce n'est pas une exposition Vuitton mais une exposition sur les malles Vuitton...
Enfin beaucoup de bruit qui occulte l'intérêt historique et esthétique d'une exposition très bien réalisée!
En ce weekend pluvieux, profitez-en pour la visiter et vous forger votre propre avis: c'est le meilleur conseil que je puisse vous donner!
Un petit site (un peu lent et pas toujours très opérationnel mais bon...) la présente: http://www.louisvuitton-voyageencapitale.com/
J'adore votre blog ! C'est original que 3 soeurs tiennent un blog ensemble !
RépondreSupprimerJ'aime bien le sac en argenté !
A bientôt !
Un bel article :)
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